C’est au Salon de Détroit 1992 que Jeep a présenté le tout premier Grand Cherokee, dans une mise en scène spectaculaire. Une première pour la marque qui lui aura fait la meilleure publicité pour le modèle.
Quand Jeep innove pour la première du Grand Cherokee
L’objectif du lancement d’un nouveau modèle est d’obtenir une couverture médiatique et de faire parler de votre nouveau produit. Dès lors, comment convaincre un maximum de personnes qui deviendront potentiellement de futurs clients ? C’est le dilemme d’une campagne de promotion pour un nouveau produit d’un constructeur. Et chez Jeep, on a des têtes pensantes qui ont des idées vraiment innovantes. C’est le regretté Tom Kowaleski, responsable de la communication chez Chrysler, qui pensa à cette mise en scène.
Kowaleski avait rejoint Chrysler en 1988 après avoir travaillé pour AMC et Renault. Ses idées ont apporté une touche de show-business au monde de l’automobile et ont permis à Chrysler d’atteindre un public beaucoup plus large que celui de la presse automobile traditionnelle. Le lancement du nouveau Grand Cherokee en 1992 en est peut-être le meilleur exemple. Aucun des médias présents au Salon international de l’automobile d’Amérique du Nord ne savait ce qui allait se passer ce 7 janvier. On leur avait dit de se rassembler dans le hall du Cobo Hall parce que « quelque chose » se préparait.
Le Grand Cherokee « casse la baraque »
La couverture télévisée en direct a débuté à l’usine d’assemblage Jefferson North. Celle-là même inaugurée l’année précédente. Au lancement du direct, on voit des employés se tenant autour d’une Grand Cherokee Laredo rouge flamme étincelante. Tom Breneiser, directeur de l’usine, et Aaron Taylor, représentant de l’UAW, ont levé le pouce avec enthousiasme lorsqu’ils sont montés à bord. Ils roulaient à bord du Grand Cherokee avant de quitter la chaîne de montage en direction de Jefferson Avenue. Là, l’équipe composée du PDG de Chrysler, Bob Lutz, et du maire de Détroit, Coleman Young, a pris le relais.
Avec un trajet d’à peine 10 km depuis l’usine pour rejoindre le lieu du North American International Auto Show (Salon de Détroit), les caméras ont suivi ce parcours. Feux de détresse et phares allumés, c’est sous bonne escorte de la police que le nouveau Jeep devait rejoindre son point de rendez-vous. Une fois arrivé sur place, la suite est tout simplement improbable, digne des meilleurs films d’Hollywood.
Sur le parvis de l’établissement, Bob Lutz ralenti et se dirige vers un plan incliné à l’entrée du bâtiment. Lutz enclenche la boîte courte, et escalade la rampe de fortune, feux allumés éclairant le plafond. Arrivé à la cime, la Jeep arrive au niveau d’une vitrine, qu’elle fracasse quand Lutz écrase l’accélérateur. Une vitre qui explose en petits morceaux, décorant le capot telle une pluie de diamants, la photo est réussie.
Une scène incroyable, une publicité unique !
L’effet est impressionnant. Le dernier 4×4 de Jeep avait pénétré dans le bâtiment d’une manière qui lui garantissait une exposition médiatique unique. Lutz continue son chemin et va amener le Grand Cherokee jusqu’à son hall d’exposition. L’assemblée est médusée et déjà les journalistes imaginent les meilleurs titres possibles.
Bob Lutz se souvient de cet exploit médiatique réalisé par Jeep ce jour-là, et l’a raconté au média Road & Track. « En tant que président de Chrysler à l’époque, j’étais au volant, avec Coleman Young, le « maire à vie » de Détroit, en passager. L’image du nouveau SUV pénétrant dans Cobo sous une pluie de verre a été diffusée dans tous les grands médias. Cet exploit a permis de faire connaître le nouveau véhicule pour une fraction du coût d’un lancement publicitaire conventionnel. »
« Mais la cascade n’était pas aussi téméraire qu’elle en avait l’air. Nous avons dû obtenir l’autorisation des responsables du Cobo Hall, qui avaient des préoccupations justifiées en matière de sécurité. Le bureau du maire a dû approuver sa participation à un acte apparemment périlleux au profit d’une société. »
« C’est ainsi que je l’ai conduit sur les nids-de-poule de l’avenue Jefferson, son service de sécurité se trouvant à 50 mètres derrière lui, jusqu’à notre position de lancement au bas des marches. La vitrine que nous allions bientôt briser a fait l’objet d’une planification et d’une construction spécifique. Tout fut calculé pour minimiser les risques que d’énormes éclats de verre pénètrent dans le pare-brise et blessent le maire ou moi-même. Un vitre en verre trempé à permis à cette dernière d’exploser en milliers de morceaux pour que l’effet soit garanti. »
Une publicité quasiment gratuite
Et ça a marché. Jeep a vendu près d’un quart de million de Grand Cherokee la première année, et lorsque la production de la ZJ s’est achevée six ans plus tard, près de 1,7 million d’unités avaient trouvé un foyer.